Fabien Sarfati
Parisien de naissance, en 1981 je pouvais me revendiquer
Royannais d'adoption, j'y avais passé toutes mes vacances pendant près
de vingt ans. C'est donc en vacancier, mais pas en touriste lochon*,
que je suis arrivé ce jour d'août 1981 dans les locaux de RF situés au
casino (vestige, disparu depuis, de la reconstruction des années 50).
Christian Auger m'avait parlé de cette radio fraîchement apparue.
Digression n°1 : Christian, les vinyls et moi
Christian je l'avais connu disquaire et j'avais passé des heures dans
le magasin ou il bossait les saisons précédentes à écouter et discuter
des musiques de l'époque, c'était très agréable et cela préfigurait ma
tendance à ignorer la plage au profit des plages sonores !
En 1981 donc, Christian que j'étais allé voir dès mon
arrivée, m'a parlé de ces nouvelles stations apparues depuis peu. Nous
avons visité RCB (Radio Côte de Beauté) et puis nous sommes allés au
casino.
Il y avait là deux types, Philippe et Alain, dans une studette de radio
avec un malheureux carton de vinyls, un équipement de disco-mobile de
base (sans les "light show" très en vogue à l'époque, j'en avais dans
ma chambre !), un petit émetteur et surtout un ventilateur, pas
pour l'animateur pour l'émetteur. Cette pièce entièrement vitrée (c'est
ce qu'il y a de mieux pour l'acoustique !) ressemblait plus au
local du gardien qu'à un lieu de création radiophonique. Je suis
arrivé, j'ai posé quelques questions et j'ai surtout raconté ce qui se
passait à Paris sur la bande FM.
Digression n°2 : Incollable FM En 1981, au lieu de
réviser, toutes les nuits, le casque rivé sur les oreilles, je
balayais, j'explorais, j'enregistrais, j'inventoriais les ondes
nouvellement libérées.
Rappel pour les plus jeunes :
Monopole de la radiodiffusion oblige en ce début des années 80, pas
grand-chose à se mettre sous les oreilles et ce ne sont pas les
périphériques (grandes ondes, son pourri, pubs tapageuses) qui comblent
le besoin d'air frais. Avant 1981 la FM à Paris c'était :
FRANCE INTER, FRANCE MUSIQUE, FRANCE CULTURE, FIP, RADIO 7* & BASTA (basta n'est pas le nom
d'une radio !).
Cette connaissance des ondes parisiennes suscite l'intérêt de
Philippe Tranchet et Alain Péricaud.
C'est Alain qui va donc m'interviewer à l'antenne sur ce sujet. Le
courant passe, je fais face aux épreuves (questions pièges, chambre
d'écho…) avec succès. L'entretien radiophonique est devenu entretien
"d'embauche".
En effet, fort de mon érudition sur l'univers radio et d'une relative aisance* au micro,
j'intègre l'équipe pour des prises d'antenne irrégulières.
Me voici donc livré à moi-même dans une bulle de verre avec une ville
qui m'écoute, 3 disques et un téléphone. Une fois les délires verbaux
passés (ma première émission*
avait pour titre delirium tremens) et les disques diffusés
(avec un faible pour Donald Fagen), je m'attaque à la narration
improvisée d'une histoire tordue et faute d'inspiration ou de salive,
je fais appel aux auditeurs (combien sont-ils, on ne sait rien alors de
l'audience, de l'impact de la diffusion sur Royan) et c'est ainsi qu'à
la manière d'un cadavre exquis se déroule la trame d'un récit
interactif (ce n'était pas encore la mode) et déjanté. Quelle joie
d'entendre les auditeurs, les idées fusent, ça part dans tous les sens,
on surfe avec joie sur la nouvelle improvisée qui avance.
Si vous souvenez de ces émissions écrivez au
webmaster pour nous dire ce qu'il vous en reste.
Les émissions que j'ai animées n'étaient pas toutes aussi
exaltantes (voir aussi la rubrique "je me souviens"), j'ai moi aussi parfois jouer au
simple pousse disques, essayant toutefois d'y mettre une patte
personnelle. J'y ai toujours pris beaucoup de plaisir qui, je l'espère
a été partagé.
Années après années, durant mes vacances, ignorant l'attrait du bord de
mer, j'ai donc traîné mes guêtres à la station, profitant d'un créneau
libre ou d'une nuit pour squatter les ondes. J'ai connu tous les
studios, croisé quelques grandes figures de la station, avec le statut
paradoxal de pionnier des origines et de simple visiteur.
En conclusion :
J'ignore si le futur donnera à nouveau l'occasion à des groupes de
personnes aussi différentes, l'occasion de construire un projet aussi
enthousiasmant, de façon aussi spontanée. Tous ceux qui ont participé à
l'aventure en ont retiré, j'en suis sûr, énormément du point de vue
personnel et sans doute professionnel. Royan Fréquence fut pour moi un
formidable "club Mickey pour grands"(et ce n'est pas péjoratif), J'y ai
appris beaucoup, j'y ai fait de nombreuses rencontres amicales ou
plus !
Souhaitons que ces souvenirs (brillamment ravivés par ce site) ne
génèrent pas que de la nostalgie mais un encouragement pour d'autres
initiatives…
* Lochon :
terme local désignant l'archétype du beauf en vacances. Retour au texte
*RADIO 7 :
station "jeune" crée par Giscard un an plus tôt.Retour
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*Depuis 1975 je
confectionne de programmes de radio dont la diffusion se fait par
l'intermédiaire de cassettes audio dans mon entourage.Retour
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* Musique du générique :
"twist à St Tropez", la version du groupe TELEX, je vous la recommande.Retour au texte