Nathalie Pain (Roxane 82-88)

Chère RF

Quand je t'ai connue, tu avais 1 an et demi. C'est « Dieu François » qui avait permis ta conception. Un père et quelques tontons t'ont mise au monde. Un peu plus tard, tu as eu aussi un parrain célèbre, un chanteur à la mode. Tu lui as d'ailleurs porté bonheur, puisqu'il l'est toujours… à la mode. Et puis, tu as eu plusieurs amoureux et amoureuses. Tu n'étais pas sectaire. Cela tournait même à la schizophrénie dans ton cas. Tu avais un tas de personnalités bien différentes. Parfois, tu étais nostalgique, parfois rock, parfois new wave (une expression un peu désuète aujourd'hui), punk, française mais aussi tiers-monde. Il t'arrivait même d'être sportive, drôle, 7e art… C’était cela qui faisait ton charme et qui te rendait unique.

Ma liaison avec toi a duré 6 ans. Nous nous voyions surtout le week-end mais aussi, pendant l'après-midi. Pour toi, J'ai même changé de prénom : tu m'appelais Roxane. Je connaissais bien tes autres amoureux, mais nous n'étions pas jaloux les uns des autres. À l’époque, je voyais surtout Jean Luc, Oliver, David, Christian… Nous prenions soin de toi, nous avions le feu sacré. Et puis, un jour, ton père t'a choisi une mère, une mère nourricière car tu souffrais souvent de la faim. Elle s'appelait la publicité. Elle t'a bien nourri la publicité mais comme toutes les mères, elle t'a aussi appris les bonnes manières et elle t'a ôté un peu de ta liberté. Nous t'aimions quand même. Tu avais de plus en plus d'amoureux, certains partaient, d'autres arrivaient, il y avait toujours quelqu'un pour te faire la cour, dés le matin et très tard le soir. Sans parler de tes invités qui avaient parfois des noms étranges : Steely Dan, 10 CC, Bruce Springsteen, Les Sugarcubes, Les Smiths, Kate Bush… Ils arrivaient de tous les pays, certains s'invitaient même très souvent comme Les Beatles ou Les Stones !

Et puis, je suis partie. Pour être avec une grande sœur à toi : Radio France. Ce n'était pas de l'amour, c'était un mariage de raison. D'ailleurs, elle m'a quitté sans préavis, bien fait pour moi.

Un jour, j'ai appris ta mort. Ton père, fatigué, avait décidé de jeter l'éponge.

Ce jour-là, J'ai ressenti comme un grand vide, comme une page qui se tourne, ma jeunesse qui fout l'camp. Avec toi, j'ai vécu les plus belles années de ma vie….

Nathalie Pain (Roxane 82-88)

Juin 2002

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